Projet de révision de la Constitution : une charte pour une « Nouvelle Algérie »

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La nouvelle Constitution «se veut une rupture totale avec les pratiques du passé, en adéquation avec les exigences de l’édification de l’Etat moderne et en réponse aux revendications du Hirak populaire», d’autant plus que le président de la République, Abdelmadjid Tebboune a veillé à ce que la Constitution, dans sa nouvelle mouture, soit la plus largement «consensuelle», en permettant aux différentes franges populaires et aux faiseurs d’opinion, de «la débattre quatre mois durant, en dépit des restrictions imposées par la crise sanitaire» dues à la Covid-19.
Par Farid HOUALI

Le projet de loi relatif à la révision de la Constitution, est un des principaux engagements politiques du président de la République, Abdelmadjid Tebboune, visant à instaurer un Etat moderne à travers une «réforme globale» de ses institutions et a été élaboré à la lumière des éléments sélectionnés par le comité d’experts chargés de la révision constitutionnelle, parmi les propositions (au nombre de 5.018) reçues de la part des différentes franges de la société, de personnalités nationales et de forces politiques.

Le projet «répond aux revendications du Hirak populaire authentique béni», a déclaré le président Tebboune lors du Conseil des ministres, le 6 septembre dernier, affirmant avoir veillé à ce que la Constitution, dans sa nouvelle mouture, soit «la plus largement consensuelle», en dépit des entraves imposées par la crise sanitaire. Le texte de loi relatif à la révision de la Constitution a reçu l’approbation du Parlement après son adoption le12 septembre, par la Conseil de la Nation (Chambre haute), un texte visant à instaurer un Etat moderne à travers une «réforme globale» de ses institutions. Le projet de loi relatif à la révision constitutionnelle, adopté également quelques jours auparavant, par l’Assemblée populaire nationale (APN), sera soumis à référendum le 1er novembre prochain, date hautement symbolique marquant le déclenchement de la Guerre de libération nationale.

La Constitution révisée «permettra de concrétiser l’engagement du président de la République pour l’édification d’une nouvelle République, en jetant les bases d’un Etat moderne au service du citoyen et en rétablissant la confiance entre le peuple et ses institutions», a déclaré le Premier ministre, Abdelaziz Djerad, lors de la présentation du texte devant la commission des affaires juridiques du Conseil de la nation.

La nouvelle mouture de la Loi fondamentale vise à mettre l’Algérie «à l’abri des dépassements autocratiques et hégémoniques qu’elle a connus par le passé», a-t-il précisé devant la commission juridique de l’APN.

La présidence de la République avait, pour rappel, choisi une date symbolique, la veille de la commémoration des massacres du 8 mai 1945 – instituée d’ailleurs « Journée nationale de la mémoire »– pour rendre publique la mouture de l’avant-projet de révision de la Constitution, projet phare du Président Abdelmadjid Tebboune, soumis à débat par la classe politique et la société civile. Le texte proposé se veut « une plate-forme de débat » pour doter le pays d’une «Constitution consensuelle à la hauteur des aspirations du peuple ».

La mouture est le fruit du travail d’un comité d’experts, des juristes en majorité, installé début janvier par Tebboune et présidé par Ahmed Larabeh, expert juridique et membre de la Commission du droit international des Nations unies depuis 2011.

Les axes principaux de la Nouvelle constitution

Le texte de loi relatif à la révision de la Constitution comprend une série de propositions réparties sur six axes. Il s’agit des «droits fondamentaux et libertés publiques», du «renforcement de la séparation et de l’équilibre des pouvoirs», de «l’indépendance de la justice», de «la Cour constitutionnelle», de la «transparence, prévention et lutte contre la corruption» et de «l’Autorité nationale indépendante des élections».

En matière de droits fondamentaux et liberté publiques, le texte introduit une disposition portant obligation aux institutions et pouvoirs publics de respecter les dispositions constitutionnelles en relation avec les droits fondamentaux et les libertés publiques et interdit de limiter ces droits et libertés qu’en vertu d’une loi et pour des raisons liées à la protection de l’ordre public et à la protection d’autres droits et libertés consacrés par la Constitution. Il consacre constitutionnellement la liberté de la presse sous toutes ses formes et interdit le contrôle préalable sur cette liberté. Le texte dispose aussi que la loi ne doit pas comporter des dispositions de nature à entraver la liberté de création des partis politiques.

Dans le domaine de la séparation et de l’équilibre des pouvoirs, le texte de loi prévoit, entre autres, la limitation du mandat présidentiel à deux mandats successifs ou séparés et la consolidation de l’institution du chef de gouvernement.

Dans le chapitre consacré au gouvernement, figure un nouvel article (103) disposant que «le gouvernement est dirigé par un Premier ministre lorsqu’il résulte des élections législatives une majorité présidentielle» et par «un chef du gouvernement lorsqu’il résulte des élections législatives une majorité parlementaire».

Le document prévoit, en outre, la limitation du mandat parlementaire à deux mandats, la suppression du droit de légiférer par ordonnances durant les vacances parlementaires et l’obligation faite au gouvernement de faire accompagner les projets de lois par des textes réglementaires d’application, faute de quoi les projets de lois ne seront pas inscrits à l’ordre du jour du Parlement. Plusieurs lois adoptées dans le passé par le Parlement n’ont jamais été appliquées en raison de l’absence de textes d’application.

Á propos de l’indépendance de la justice, le texte stipule son renforcement à travers la constitutionnalisation du principe de l’inamovibilité du juge du siège. Dans le même ordre d’idées, le ministre de la Justice et le procureur général près la Cour suprême ne font plus partie du Conseil supérieur de la magistrature, au sein duquel il est prévu que siègent deux représentants syndicaux des magistrats et le président du Conseil national des droits de l’Homme. Le texte prévoit, en outre, d’instituer une Cour constitutionnelle en lieu et place du Conseil constitutionnel. Il propose, également, la constitutionnalisation de l’Autorité de transparence, de prévention et de lutte contre la corruption et de l’Autorité nationale indépendante des élections. Le document consacre le Conseil national économique, social et environnemental (art. 209) en tant que «cadre de dialogue, de concertation, de proposition, de prospective et d’analyse dans le domaine économique, social et environnemental, placé sous l’autorité du président de la République».

Il institue un Observatoire national de la société civile (art. 213), un organe consultatif placé auprès du président de la République qui «émet des avis et recommandations relatifs aux préoccupations de la société civile» et une Académie algérienne des sciences et des technologies, un «organe indépendant à caractère scientifique et technologique».

Le texte de loi comprend, par ailleurs, des propositions hors axes, notamment la constitutionnalisation du mouvement populaire du 22 février 2019 dans le préambule de la Constitution, la prohibition du discours haineux et de discrimination, l’insertion de tamazight comme disposition qui ne peut faire l’objet de révision, la constitutionnalisation de la participation de l’Algérie à des opérations de maintien de la paix sous les auspices des Nations unies et de la participation de l’Algérie à la restauration de la paix dans la région dans le cadre d’accords bilatéraux.

L’ANP mobilisée

Comme à chaque rendez-vous électoral, l’ANP réaffirme encore une fois sa disponibilité à réunir tous les facteurs de la stabilité et de la sécurité sur l’ensemble du territoire national afin de permettre aux citoyens d’accomplir leur devoir et leur droit de vote lors du référendum populaire portant sur la révision constitutionnelle prévu le 1er novembre prochain.

« L’Algérie s’apprête, dans les semaines à venir, à organiser le référendum sur la Constitution en date du 1er novembre prochain. Ce référendum qui constitue une étape importante dans le processus visant à tracer les repères du nouvel Etat algérien, comme l’a promis le président de la République, chef suprême des forces armées, ministre de la Défense nationale, lors de sa campagne électorale, afin de concrétiser les attentes légitimes des générations de l’indépendance », affirmait à ce propos le général de corps d’armée Saïd Chanegriha, chef d’état-major de l’ANP lors de l’installation officielle du nouveau commandant de la 2e RM (Oran), le 19 septembre dernier.

Le général de corps d’armée a dans ce contexte, souligné que le haut-commandement de l’ANP fournira tous les efforts nécessaires afin de faire de cette étape cruciale une totale réussite, en soutenant entièrement les démarches des institutions de l’Etat, visant à atteindre de nouveau la renaissance et le progrès de l’Algérie, grâce aux plus dévoués et intègres parmi ses fils, en particulier les jeunes qui sont l’atout de la nation, en tout temps. Ces jeunes, en qui nous percevons un présage de bon augure pour le présent et le futur du pays, seront à la hauteur de la lourde responsabilité et des défis rencontrés, et suivront les pas de leurs valeureux ancêtres, qui ont sacrifié ce qu’ils avaient de plus cher pour la gloire de l’Algérie.

Á ce titre précisément, Saïd Chanegriha rappelle avoir « donné » des instructions strictes à l’ensemble des composantes de l’ANP et des services de sécurité sur « la nécessité de faire preuve des plus hauts degrés de vigilance et de disponibilité, et de veiller à la sécurisation globale et totale de ce référendum, afin de permettre aux citoyens, à travers tout le pays, d’accomplir leur droit et devoir électoraux dans un climat de sérénité et de quiétude et ce, dans le cadre de l’immense responsabilité nationale que nous nous enorgueillissons d’assumer, afin de préserver la sécurité et la stabilité de notre pays, qui mérite que nous le défendions aujourd’hui et chaque jour, en toutes circonstances, quels qu’en soient les sacrifices ».

Un protocole sanitaire pour le référendum

Un protocole sanitaire pour le référendum sur la révision constitutionnelle, prévu le 1er novembre prochain, a été signé le 8 septembre, en vue de prévenir contre la propagation du nouveau coronavirus (Covid-19), par Mohamed Charfi, président de l’Autorité nationale indépendante des élections (ANIE), Abderrahmane Benbouzid, ministre de la Santé, de la Population et de la Réforme hospitalière, en présence de Smaïl Mesbah, ministre délégué auprès du ministère de la Santé, de la Population et de la Réforme hospitalière, chargé de la Réforme hospitalière, et de Bouzid Lazhari, président du Conseil national des droits de l’Homme (CNDH), outre les membres du Comité scientifique de suivi de l’évolution de la pandémie du nouveau coronavirus.

Á cette occasion, Mohamed Charfi a mis l’accent sur l’importance du rendez-vous de révision constitutionnelle qui s’inscrit «dans le cadre de la dynamique de changement et d’accroissement de l’espoir pour l’édification de l’Algérie nouvelle», mettant en exergue «les pas franchis par le pays, en dépit de la pandémie de Covid-19 ayant entravé la poursuite des projets».

Pour le président de l’ANIE, « la révision de la constitution n’est pas chose facile, au vu de son contenu civilisationnel dans l’édification des institutions de l’Algérie», valorisant, par la même, la signature de ce protocole sanitaire qui «régira la gestion et l’organisation du référendum sur le projet de révision constitutionnelle, prévu le 1er novembre prochain». Ce protocole est à même de réaliser «la complémentarité et la coordination» entre l’ANIE et les institutions de l’Etat, en sus de la garantie de la sécurité de l’organisation du référendum.

Par ailleurs, il a assuré que toutes les conditions sont réunies pour permettre aux citoyens d’accomplir leur devoir électoral lors de ce rendez-vous qui constitue, a-t-il estimé, «la clé pour l’avenir dans l’édification de l’Algérie nouvelle». De son côté, le ministre de la Santé a estimé que «la conjoncture exceptionnelle que traverse l’Algérie verra bientôt la pose d’un nouveau jalon qui définira les perspectives futures, à travers une nouvelle Constitution instaurant un Etat fort au service du citoyen». Il a rappelé le suivi et la garantie de toutes les facilitations permettant la prise en charge et l’organisation du référendum dans les meilleures conditions, d’autant que le protocole proposé par l’ANIE «a été approuvé par le Conseil scientifique placé sous la tutelle du ministère de la Santé». Il a affirmé que son département mobilisera «tous les moyens nécessaires et l’appui matériel pour la réussite de ce rendez-vous», appelant le personnel de la santé à coordonner avec les services concernés en prévision de ce référendum. Louz Souria, membre de l’ANIE, a présenté un exposé détaillé sur toutes les étapes du déroulement du référendum.

F. H.

 

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